Quand la chaleur perturbe les rails : entretien avec la SNCF et un syndicaliste sur les conséquences de la canicule sur le trafic

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Publié le Écrit par Elina Weil

Ces derniers jours, la canicule a impacté nos quotidiens de diverses manières, touchant nos vies, pour chacun, différemment. Qu’en est-il de ses impacts sur le ferroviaire ? Eclairage.

Nous avons interrogé la SNCF et un conducteur de TER, par ailleurs engagé syndicalement et leur avons posé les mêmes questions sur l’impact des chaleurs de la semaine qui vient de passer sur la circulation, le matériel ferroviaire et la prise en charge des usagers. Voici leurs réponses.

Quels sont les impacts des grandes chaleurs sur le matériel ferroviaire ?

  • SNCF Occitanie :  Sur la partie réseaux évidemment, les fortes chaleurs ont un impact sur les infrastructures, puisque le réseau est exposé aux aléas météorologiques comme les épisodes caniculaires. De ce fait, une surveillance régulière est organisée. L’impact peut être de différents ordres : les caténaires qui alimentent les trains, sous l’effet de la chaleur, peuvent se distendre. Or, elles doivent être parfaitement rectilignes pour fonctionner de manière optimale, c’est donc quelque chose que l’on surveille attentivement. On peut aussi avoir des impacts sur les rails avec des phénomènes de dilatation qui peuvent nous amener à prendre des mesures et à réduire sur certaines zones la circulation des trains, en supprimer ou limiter leur vitesse. Le plus souvent, il s’agit de réductions de la vitesse. Les températures des rails peuvent atteindre 60 degrés quand on a des périodes à 40-45 degrés comme ces derniers jours. Ceci a évidemment des impacts et ce sont des événements que nous surveillons attentivement. Nous nous adaptons lors de canicules. On intervient en amont de la surveillance d’été et des épisodes caniculaires, de sorte à pouvoir faire circuler les trains en toute sécurité. Des tournées spécifiques sont organisées, notamment avant l’été avec des agents en charge de la maintenance qui vont identifier des opérations à réaliser afin que les installations ferroviaires supportent le mieux possible des températures élevées quand elles arriveront. On a aussi des opérations de maîtrise de la végétation qui sont réalisées aux abords des voies, pour réduire notamment le risque d’incendies ou de chutes d’arbres à proximité. Il faut bien comprendre qu’il s’agit d’un travail engagé tout au long de l’année et qui se fait aussi en anticipant. Ce sont des épisodes ponctuels qui se préparent en amont au même titre que les périodes automnales, hivernales avec les risques liés au givre et aux différentes intempéries. Nous procédons en été de la même manière que pour les autres saisons. Ceci dit, les risques ne sont pas forcément les mêmes, mais dans tous les cas, tout est préparé en amont.”   
  • Sébastien Aïssou, conducteur de TER à la SNCF et syndicat CGT Cheminots SNCF : Le système peut tomber en panne, ce qui entraîne des arrêts de trains ou une réduction des vitesses de circulation. C’est problématique, car il y a tellement de trains que si vous commencez à faire rouler tous les trains à vitesse réduite, il n’y a quasiment plus de trains qui roulent. Donc l’entreprise fait par exemple le choix de supprimer 1 train sur 2 ce qui laisse plus d’ordre de passage sur la voie et permet de faire rouler quelques trains quand même, mais ces trains-là roulent souvent à vitesse réduite et engendrent donc des retards plus ou moins importants. Ce sont surtout les parties électroniques et électromécaniques qui souffrent en période de canicule, car l’électronique ne supporte pas les chaleurs extrêmes. Le rail peut également en pâtir mais ce n’est pas le premier poste où la situation pose problème. Mais cela arrive aussi car l’entreprise supprime des postes à l’entretien du matériel. Les caténaires souffrent aussi, car elles se dilatent. Il y a un système qui permet qu’elles se retendent mais quand il fait vraiment trop chaud, on nous demande de ralentir pour ne pas abîmer les caténaires. Dans le pire des cas, les trains s’arrêtent. Ce n’est pas dangereux, la boucle de sécurité fonctionne. Ceci dit, le souci, en période de grosses chaleurs, c’est qu’on n’a pas du matériel fiable à 100% parce qu’on manque de monde dans les ateliers pour l’entretien et nous avons aussi un manque d’investissement financier de la part de l’entreprise.

Y a-il un manque d’investissement sur les Intercités qui est mis au jour dans ce contexte de canicule ?

  • La SNCF Occitanie :  Les préparations du matériel et la vigilance sont les mêmes pour toutes les activités et les mêmes lors d’épisodes caniculaires comme pour le reste de l’année.
  • Sébastien Aïssou, conducteur de TER à la SNCF et syndicat CGT Cheminots SNCF Il y a une grosse problématique d’investissement. Aujourd’hui, on se retrouve avec du matériel vieillissant, tout le monde le subit. Quand vous vous retrouvez avec un manque de personnel et du matériel vieillissant, un manque de personnel pour l’entretien, par exemple sur le Bordeaux-Marseille : la climatisation n’est plus bonne, ce matériel circule sans et aujourd’hui, la SNCF fait le choix de fermer les voitures Intercités Bordeaux-Marseille, de ce fait. La SNCF, pour une difficulté de climatisation, fait le choix de fermer les réservations ou de supprimer les circulations. Hier soir, les trains Bordeaux-Marseille ont été supprimés du fait de la chaleur qui a impacté les voitures dans laquelle on met les usagers sans clim’. Un effet direct de la canicule avec plusieurs trains concernés. En résumé, l’infrastructure souffre de la chaleur parce qu’elle souffre aussi d’investissement et de difficultés à l’entretien. Il n’y a pas assez d’investissement et les agents ne sont pas en nombre suffisant pour pouvoir entretenir les trains. On a les capacités intellectuelles et financières de pouvoir améliorer les choses, d’investir sur du nouveau matériel, d’embaucher des agents pour l’entretien, mais le choix politique de l’entreprise est de vouloir faire des économies ce qui fait qu’aujourd’hui, on a du mal à faire circuler les trains. Tant que l’entreprise reste campée sur ses positions, on n’avancera pas. C’est un problème organisationnel et d’investissement. La SNCF n’investit plus et n’entretient plus les locomotives et les salariés restent la variable d’ajustement de l’entreprise. Donc oui, on peut dire que le manque d’investissement sur les Intercités explique les difficultés mises au jour à l’occasion de la canicule. On a pris trop de retard sur les investissements, malgré les projets en cours concernant le TGV, le TER et Intercités.

INFOS : Dans le cadre du plan canicule, des bouteilles d’eau sont distribuées gratuitement dans les gares et les trains. Des fontaines à eau sont également mises à disposition dans les grandes gares et des bons pour retirer des bouteilles d’eau dans les Relay sont distribués. Des messages peuvent être adressés aux clients, notamment pour faire de la prévention avec les bons gestes à faire en période de canicule, savoir qui alerter si une personne fait un malaise du fait de la chaleur etc…

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