Ouverture à la concurrence, aménagement urbain : le plan de la SNCF pour les gares

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Par Fabrice Gliszczynski et César Armand  | 

Patrick Ropert, directeur général de SNCF Gares & Connexions et Patrick Jeantet, PDG de SNCF Réseau devant les quais de la gare du Nord à Paris.
Patrick Ropert, directeur général de SNCF Gares & Connexions et Patrick Jeantet, PDG de SNCF Réseau devant les quais de la gare du Nord à Paris. (Crédits : Marie-Amélie Journel)

À moins d’un an de la mise en place de la loi réformant le système ferroviaire français et l’ouverture à la concurrence du marché ferroviaire de passagers sur le réseau intérieur, Patrick Jeantet et Patrick Ropert, respectivement PDG de SNCF Réseau et directeur général de SNCF Gares & Connexions, détaillent dans une interview croisée à La Tribune leur stratégie pour les gares dans ce nouvel environnement.

LA TRIBUNE – La loi réformant le système ferroviaire français va entrer en vigueur en 2020 au moment de l’ouverture à la concurrence du marché ferroviaire de passagers sur le réseau intérieur. Que change-t-elle pour SNCF Gares & Connexions, l’entité de la SNCF qui gère les gares ?

PATRICK ROPERT – Cette loi change beaucoup de choses. Tout d’abord, SNCF Gares & Connexions devient une société anonyme, filiale à 100% de SNCF Réseau, le gestionnaire d’infrastructures. Jusqu’ici nous étions rattachés à SNCF Mobilités, l’exploitant ferroviaire. C’est du bon sens : il y a un enjeu d’unité d’exploitation des gares et de cohérence des activités en monopole.

La loi fixe trois missions de service public pour les gares. La première consiste, dans la perspective de l’ouverture à la concurrence, à accueillir tous les trains de tous les transporteurs et à assurer une équité de traitement entre tous les opérateurs. La deuxième impose d’accueillir dans les gares toutes les solutions de transport et de devenir ainsi une vraie plateforme d’intégration des solutions de mobilités. La troisième mission pose le rôle des gares dans l’aménagement urbain et dans l’aménagement du territoire.

PATRICK JEANTET – La gare est, en effet, un pôle multimodal : elle a un rôle d’aménagement du territoire et vise à garantir l’équité de traitement entre toutes les entreprises ferroviaires. Notre intérêt en tant que gestionnaire d’infrastructures est que la part du transport ferroviaire augmente par rapport aux autres modes de transport. C’est aussi un intérêt sociétal car le développement du transport ferroviaire signifie moins de gaz à effet de serre et plus d’aménagement du territoire. Nous constatons aujourd’hui une très forte demande d’augmenter la part du transport ferroviaire.

Comment les gares peuvent-elles jouer un rôle significatif dans l’aménagement du territoire ?

P.J. – Le mouvement des “Gilets jaunes” l’a montré. Il y a aujourd’hui en France une inégalité territoriale forte. SNCF Réseau et SNCF Gares & Connexions doivent, ensemble, nouer davantage de partenariats avec les villes, les petites en particulier, pour essayer d’améliorer les services publics dans les gares. Les gares sont des pôles multimodaux où l’on trouve des gares routières, des taxis, des voitures en autopartage, etc. Elles sont des endroits où passent beaucoup de personnes. Il faut par conséquent développer les services en gare et créer des pôles multiservices dans les petites gares. Il faut faire du cas par cas avec les élus locaux. Nous pourrions par exemple développer dans ces gares des services qui les redynamisent en termes de présence comme, par exemple, des dépôts et retraits de colis, des points d’accès Internet et wifi, des “répar-café”, des médiathèques, ou bien des cabinets médicaux et de kinésithérapie.

Dans les grandes métropoles, avec l’étalement urbain et l’existence de zones pavillonnaires en périphérie, il y a moins de centres-villes, moins de socialisation aussi. Il suffit d’aller dans la grande banlieue parisienne pour s’en apercevoir. À Melbourne, par exemple, les autorités nous demandent de participer à la création, souvent autour des gares, de centres-villes avec une âme. C’est l’un des grands sujets de demain.

P.R. – Les gares contribuent au développement urbain des villes. Chaque fois que nous transformons une gare, nous contribuons à développer le quartier. Ainsi, gare du Nord à Paris, nous concentrerons dans la gare tout ce qui fait la ville : plus 2.500 m² d’espaces culturels, une salle de spectacle, des terrains de sport, des bureaux en plus des services de transport et des commerces. Nous le faisons dans les grandes et les petites gares.

Dans cette approche d’aménagement urbain, quel est le rôle de SNCF Immobilier qui gère et valorise le très grand patrimoine foncier de la SNCF ?

P.J. – SNCF Immobilier a un rôle majeur dans cet aménagement du territoire. Elle dispose en effet de beaucoup de terrains ferroviaires. Avec la nouvelle SNCF qui va naître en 2020, nous avons la volonté d’amplifier au niveau local le travail commun entre les équipes de SNCF Gares & Connexions, de SNCF Réseau et de SNCF Immobilier, en partenariat avec les élus locaux. À Chartres par exemple, la municipalité souhaitait développer fortement le quartier de la gare que nous projetions d’ailleurs de rénover. Nos terrains l’intéressaient. Nous les avons cédés. Au final, il y a eu une transformation radicale de ce quartier du centre-gare.

P.R. – Huit projets sur dix chez SNCF Gares & Connexions se bâtissent avec SNCF Réseau, SNCF Immobilier, en collaboration avec les villes. C’est ainsi à Chartres, à Rennes, à Nantes, à Bordeaux, à Nice, à Lorient… L’agrandissement de la gare du Nord à Paris, côté rue de Maubeuge, est rendu possible par le rachat de deux immeubles via SNCF Immobilier. Les autres projets sont des projets de transformation qui restent dans le volume existant de la gare. C’est le cas de la transformation de la gare Montparnasse, engagée en ce moment. Tous nos projets se construisent avec les collectivités locales.

Le ferroviaire peut-il faire davantage pour l’aménagement du territoire ?

P.J. – Nous souhaitons effectivement aller plus loin encore dans nos partenariats avec les municipalités quand les surfaces des gares ne correspondent plus exactement aux besoins du trafic ferroviaire. Par exemple, SNCF Réseau est en train d’installer, le long du réseau ferroviaire structurant, de la fibre optique pour des besoins ferroviaires comme le contrôle de commandes des trains. Nous allons surdimensionner les capacités pour permettre aux gares d’avoir du haut débit numérique qui, rappelons-le, n’existe pas dans beaucoup de territoires. Cela peut fournir un terreau favorable pour créer des espaces de coworking, des incubateurs…

Par ailleurs, il y a des développements importants à venir au niveau des grandes métropoles. Plusieurs d’entre elles ont l’idée de développer des RER métropolitains. C’est le cas de Bordeaux où la région Aquitaine et la métropole de Bordeaux nous ont formellement exprimé une demande en ce sens. Il y a également des réflexions à Lyon, Lille, Rennes, Marseille et Toulouse.

P.R. – Un exemple de ces nouveaux RER est le Léman Express qui reliera Genève et Bellegarde en décembre 2019. Le nouvel usage de la gare d’Annemasse nous conduit à transformer la gare avec tous les acteurs pour en faire une vraie gare du quotidien. Elle disposera de plus de services utiles à nos clients qui y passent chaque jour. Les transformations des gares se font au gré des projets de lignes et donc des enjeux de capacité ; mais aussi au gré de l’évolution des comportements de la société. Notre métier est d’adapter les services aux attentes des voyageurs et des riverains.

Les investissements ont été essentiellement consacrés aux grandes gares. Allez-vous investir dans les petites ?

P.R. – Il faut le reconnaître : au cours des 30 dernières années, nous n’avons pas assez investi dans les gares. Pour rattraper ce retard, nous investissons 700 millions d’euros dans 600 petites et moyennes gares sur les trois années 2018, 2019 et 2020. Et au total sur ces trois années, nos investissements s’élèvent à 1,2 milliard d’euros. Jamais nous n’avions autant investi dans les gares en France !

Sur les 3.000 gares françaises, des grandes et des petites. Combien parmi elles permettent de dégager des capacités de financement ?

P.R. – La loi sur la réforme ferroviaire impose un système de péréquation dans lequel les grandes gares financent les plus petites. Quand nous investissons 700 millions d’euros sur 600 petites et moyennes gares, il n’y a pas de rentabilité immédiate. Nous le faisons parce que nous sommes une entreprise publique qui a la responsabilité de gérer un patrimoine public. Pour assurer ce rôle, nous devons être en mesure d’aller chercher une forte rentabilité sur les très grands sites, les seuls capables de générer de la capacité d’autofinancement nécessaire.

La loi construit également un mécanisme de redevances qui permet uniquement de couvrir les coûts du service rendu. L’exploitation des gares se fait donc à marge nulle. Pour disposer des capacités d’investissement utiles au réseau des gares, il est donc indispensable de développer les services et les commerces dans les grandes gares. Pour répondre à votre question, 30 gares développent des activités de commerces, de services et de location de bureaux qui permettent de dégager la capacité d’investissement pour l’ensemble des gares.

P.J. – C’est la raison pour laquelle il est important de conserver l’unité de la SNCF. Sans unité, il n’y aurait plus de péréquation et les grandes gares ne pourraient pas financer les petites. Cette péréquation répond aux problèmes d’inégalité territoriale. Sur ces sujets-là, il faut aussi des cofinancements. Je crois beaucoup aux partenariats avec les collectivités.

Les collectivités sont-elles vraiment encore prêtes à co-financer ?

P.J. – J’étais récemment à Angoulême où la mairie a cofinancé, d’une manière très importante, la passerelle pour l’accessibilité. Il y a beaucoup plus de collectivités à agir ainsi qu’on ne le croit. Il y a beaucoup de cofinancements dans le cadre de l’accessibilité mais on peut imaginer dans d’autres sujets.

P.R. – Nous faisons aussi appel à des acteurs privés. Pour tripler la surface de la gare du Nord à Paris, nous avons sélectionné par appel d’offres l’entreprise Ceetrus, qui va nous accompagner pour porter les investissements et l’exploitation marchande.

La promesse du Grand Paris Express est d’offrir la ville du quart d’heure avec tous les services publics et privés à proximité. Mais déjà, le député Gilles Carrez, auteur d’un rapport sur ses ressources, pointent les futures gares comme un “angle mort” synonyme de “déficit récurrent”…

P.J. – Ce n’est pas toujours vrai. À Bordeaux par exemple, le quartier de la gare était en pleine déshérence. C’est le moins que l’on puisse dire… Aujourd’hui, il est devenu l’un des poumons importants de Bordeaux et la valeur créée globalement pour la société dans ce quartier est énorme.

P.R. – Vingt-huit des 68 gares du Grand Paris Express seront en interconnexion avec nos gares historiques. Nous travaillons d’ores et déjà ensemble avec les équipes du Grand Paris. Les enjeux sont importants. Ce sont des enjeux de flux et d’activités complémentaires. SNCF Gares & Connexions partage avec la Société du Grand Paris ses savoir-faire, ses expertises et ses retours d’expérience.

Depuis 2015, Gares & Connexion s’est lancée dans un grand plan de transformation des gares en développant fortement l’activité des services et des commerces. Quelle est la prochaine étape ?

P.R. – L’activité de services et de commerce en gare a fortement augmenté. Son revenu a bondi de 25%, passant de 170 à 214 millions d’euros en quatre ans. Cette tendance va fortement s’accélérer au cours des prochaines années avec l’ouverture de nouvelles surfaces en gares. D’ici à 2023, nous allons en effet augmenter de 30% l’espace de nos gares avec la livraison de grands projets comme la gare Montparnasse, la gare du Nord, la gare d’Austerlitz, celle de Lyon-Part-dieu, de Rennes, de Nantes et Lille Europe. Grâce à cette augmentation des surfaces en gare, nous prévoyons de doubler le revenu des activités commerciales.

Prévoyez-vous de nouvelles activités pour les gares pour augmenter les recettes ?

P.R. – Dans la mesure où la loi confie à SNCF Gares & Connexions un rôle dans l’aménagement urbain, nous pouvons aller vers de nouvelles activités, comme le logement. C’est ce que nous étudions pour la gare d’Annecy. Habiter dans la gare est d’ailleurs une vraie tendance mondiale ! Les programmes d’urbanisme que nous accompagnons en Asie et au Moyen-Orient se construisent à partir des hubs que sont les gares. Le principe est simple : vous prenez un compas, vous tracez un cercle de 600 mètres de rayon à partir de la gare – qui doit couvrir une distance de 10 minutes de marche à pied -, et vous installez à l’intérieur tout ce qui fonde la ville, des logements, des commerces, des bureaux, des lieux culturels, d’éducation. C’est une tendance très forte du développement des villes pour qu’elles soient moins congestionnées et moins polluées.

P.J. – C’est comme cela que le métro de Hong Kong, l’un des plus modernes du monde, s’est développé. Les droits à construire sur les gares du métro ont financé la totalité du système métropolitain. Au-dessus de la dernière station de Kowloon, se trouvent des immeubles qui font au moins 60 étages avec des logements, des bureaux, des grands hôtels de luxe, des centres commerciaux…

Vous l’avez indiqué, le développement des services et des commerces en gare permet d’apporter des financements aux petites et moyennes gares. Qu’apporte-t-il aux opérateurs ferroviaires ?

P.J. – Ce qui a été fait dans les grandes gares le montre bien. Sous l’impulsion de Patrick Ropert, le très fort développement des services et des commerces en gare ces dernières années permet de créer de la valeur financière qui est redistribuée à hauteur de 50% pour baisser les redevances de gare des opérateurs ferroviaires. Ces commerces et ces services en gare créent de la valeur pour SNCF, qui est réinvestie dans la mobilité.

P.R. – Notre modèle est circulaire. Plus nous gagnons avec les services et les commerces en gare et plus nous pouvons investir. Et plus nous gagnons, plus nous baissons les prix des redevances payées par les compagnies de trains. Entre 2014 et 2019, nous avons baissé de 5,5% le total des péages de gares payés par les trains en France. C’est un modèle très vertueux pour le système, différent du modèle aéroportuaire parce qu’il aligne l’opérateur des gares avec les entreprises de transport.

SNCF Réseau et SNCF Gares & Connexions vont signer chacun, un contrat de performance avec l’État. Où en sont les discussions ?

P.J. – Dans le cadre de la loi ferroviaire, SNCF Gares & Connexions et SNCF Réseau signeront chacun un contrat de performance avec l’État. Ils vont être négociés au cours des prochains mois. En choisissant le statut de société anonyme pour SNCF Gares & Connexions, le législateur a cherché à s’assurer que les financements du développement des gares n’allaient pas se noyer dans ceux nécessaires à la régénération du réseau. Vu l’ampleur de ces derniers pour rattraper des décennies de retards à cause des choix des gouvernements précédents de privilégier les investissements dans les LGV, le législateur n’a pas voulu prendre le risque d’arbitrages sur les investissements en faveur de SNCF Réseau.

Quel volume d’investissements prévoyez-vous pour les gares pour la période post-2020 ?

P.R. – Nous n’avons pas encore engagé les négociations avec l’État. Nous allons investir cette année environ 400 millions d’euros dans les gares, soit le même niveau que l’an dernier et que celui prévu en 2020. C’est le plus haut niveau d’investissements jamais réalisé dans les gares en France. Il faut rappeler que les gares souffrent d’un retard d’investissements comme le réseau ferroviaire. 70% de nos investissements concernent la remise en état du patrimoine bâti. La transformation en une société anonyme disposant de ses propres ratios d’investissements va permettre d’améliorer la performance de SNCF Gares & Connexions pour être en situation de faire plus d’investissements et nourrir plus fortement notre modèle vertueux. Nous avons la capacité de faire plus d’investissements rentables au cours des prochaines années au service de tous.

Par ailleurs, sous l’impulsion de Guillaume Pepy (président du directoire du groupe SNCF, et président de SNCF Mobilités, NDLR), SNCF Gares & Connexions est déjà une entreprise profitable et verse annuellement des dividendes à SNCF Mobilités. Il sera sain de continuer avec le nouvel actionnaire SNCF Réseau. À ce titre, la marge opérationnelle de SNCF Gares & Connexions s’est élevée à 233 millions d’euros en 2018.

P.J. – SNCF Gares & Connexions et SNCF Réseau sont des gestionnaires d’infrastructures à coûts fixes qui ont besoin de la croissance du transport ferroviaire. Car les redevances ferroviaires sont essentiellement proportionnelles au nombre de trains. L’aviation repose sur un trafic en hausse constante de 4% à 5% par an. Ce n’est pas le cas du ferroviaire. Nous devons changer ce paradigme. Pour faire de la croissance, il faut mettre beaucoup plus de trains en circulation, sur les axes où le transport ferroviaire est pertinent (comme les RER, les grandes étoiles ferroviaires, les grands axes). Dans une économie à coûts fixes, l’absence de croissance débouche à terme sur des problèmes d’investissements. Or, pour investir, il faut de la croissance prévisible. Pour que les opérateurs exploitent plus de trains, il faut baisser les coûts du ferroviaire. C’est la raison pour laquelle nous avons un plan majeur de gains de productivité à la SNCF. Il y a du potentiel, nous pouvons faire circuler plus de trains.

Les gares ont-elles les capacités suffisantes pour absorber une augmentation de trafic ?

P.R. – Accueillir plus de voyageurs est l’enjeu de tous nos investissements du moment. Nous agrandissons les gares pour recevoir plus de passagers dans de meilleures conditions. La taille de la gare du Nord va tripler parce que nous prévoyons un flux de 900.000 personnes par jour en 2030, contre 700.000 aujourd’hui. En ce qui concerne la capacité à accueillir plus de trains, cela est et reste de la responsabilité pleine et entière de SNCF Réseau.

P.J. – Il est clair les grandes gares françaises sont saturées aujourd’hui. Le plan des voies de circulation a été conçu à l’époque de la Deuxième Guerre mondiale et est évidemment inadapté. La priorité absolue est donc d’investir au cours des prochaines années dans ces nœuds ferroviaires que sont les grandes gares françaises pour non seulement permettre d’accueillir plus de trains, notamment des RER et des trains grandes lignes, mais aussi améliorer la qualité de services. Ce sujet a été peu regardé jusqu’ici. Quand les LGV ont été construites, les gares ont, certes, été réaménagées, mais l’ensemble de la partie ferroviaire de la gare n’a pas été repensé.

Quelles sont les mesures que vous allez mettre en place pour garantir une égalité de traitement entre les différents opérateurs ?

P.R. – Nous sommes déjà organisés pour répondre à cette problématique. La compagnie italienne Thello circule aujourd’hui sur des lignes de longue distance entre la France et l’Italie, et des lignes régionales en Provence-Alpes-Côte-d’Azur. Pour eux, nous avons déjà mis en place une organisation et des systèmes d’information garantissant l’équité de traitement dans l’accès aux gares. Nous avons une responsabilité particulière et sommes attentifs à bien traiter les opérateurs quels qu’ils soient. Ces activités s’organisent sous le contrôle vigilant de l’autorité de régulation [l’Arafer, Ndlr].

P.J. – C’est notre intérêt. Si nous voulons plus de trains sur le réseau, cela passe par la concurrence. Certes, il faut des garanties, mais la réalité c’est que nous sommes jugés par les résultats de SNCF Réseau et ce que ces derniers passeront par le paiement de plus de péages ferroviaires, et donc par plus de circulations des trains. En Allemagne, l’ouverture à la concurrence a augmenté le nombre de circulations de manière phénoménale. Nous avons donc intérêt à garantir une égalité de traitements entre les opérateurs. Cela fait plus de dix ans que le marché du fret ferroviaire est ouvert à la concurrence. Force et de constater que depuis trois ou quatre ans, il n’y a pas eu de plaintes auprès de l’Arafer pour des questions d’inégalité de traitement.

Que comptez-vous faire pour améliorer la qualité de services au client ?

P.R. – La qualité de services, c’est d’abord l’information, la propreté, et le confort. Des éléments basiques attendus par nos clients. La satisfaction clients en gares a progressé ces dernières années pour s’approcher d’une appréciation de 8 sur 10, notre plus haut niveau. Evidemment, il subsiste des disparités entre les gares, souvent liées aux chantiers engagés. À chaque transformation de gare achevée, la satisfaction client monte fortement.

P.J. – Pour améliorer la qualité de service, SNCF Réseau a lancé un grand programme d’amélioration de l’exploitation ferroviaire pour augmenter les départs à l’heure des trains. On est en moyenne sur la France à 75% de départs à l’heure. L’objectif est d’arriver à 90% d’ici à deux ans. Des sites ont fait des bonds incroyables comme la gare Montparnasse, par exemple, qui est déjà à 90%.

Sauf quand il y a des incidents…

P.J. – Soyons clairs, il y aura toujours des incidents dans des zones complexes dont une grande partie des équipements sont anciens. Là où nous nous sommes nettement améliorés, c’est dans le traitement de la crise. Lors du dernier incident, un tiers des circulations a été basculé vers la gare d’Austerlitz. C’est un plan pré-établi. Certes, il y a des retards importants mais quasiment tous ceux qui n’ont pas annulé ont pu partir.

Dans une stratégie de porte-à-porte, les gares sont des pivots de toutes les mobilités. À quoi ressemblera demain le parvis des gares ?

P.R. – Le parvis du XXIe siècle sera assurément la plaque tournante des mobilités. Aujourd’hui nous avons une demande massive de solutions autour des vélos. C’est pourquoi, la gare du Nord rénovée disposera d’un parking à vélos de 1.200 places sur deux niveaux. Il y a également d’autres formes de mobilité, comme les trottinettes électriques. Nous expérimentons à la gare de l’Est et la gare de Lyon des lieux de stationnement nouveaux autant pour en faciliter l’usage que pour mieux utiliser l’espace public. Nous investissons aussi sur la manière d’intégrer les véhicules électriques pour que, dans cinq-dix ans, il soit possible de prendre un véhicule aux abords de la gare en commande automatique. Et pour les petites gares, nous avons développé un concept innovant pour faciliter et développer l’usage du vélo, de la marché à pied et du covoiturage. Nous l’avons déployé à Anse, à Biganos, à Colomiers, et préparons un programme de développement important.

P.J. – Derrière tout cela, il y a la transformation des métiers des gestionnaires d’infrastructures avec le numérique et le digital. Si nous gérons des flottes de voitures électriques, nous devons réfléchir à la manière de les intégrer dans la gare. Nous devons utiliser les outils digitaux pour gérer nos réseaux, flottes de trains, de voitures électriques…. et être les champions de la mobilité de demain.

P.R. – Ce travail, nous le faisons évidemment avec nos partenaires. Nous achevons en ce moment un appel d’offres portant sur les locations de voitures en gares dans lequel nous avons demandé des solutions permettant au client de déverrouiller le véhicule avec son smartphone. Ces nouvelles facilités permettent de proposer plus de gares avec ces services.

Après les tentatives d’attentats dans le Thalys en 2015 avait relancé le débat sur le niveau de sûreté des gares par rapport aux aéroports. Comment intégrez-vous ces questions de sûreté dans la transformation des gares ?

P.R. – Nous travaillons avec tous les services de l’État. Nous renforçons les équipes de sûreté  et les complétons par des équipes en civil aidées par la vidéo. Nous déployons massivement la vidéosurveillance. D’ores et déjà nous préparons les Jeux Olympiques 2024 qui nous conduiront à franchir de nouvelles étapes dans ces domaines de la sûreté.

 

 

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