Fortes perturbations à la SNCF : pour la direction, ce mouvement social inopiné « n’est d’aucune utilité »

https://www.lemonde.fr/economie/article/2019/10/18/sncf-un-mouvement-social-surprise-perturbe-la-circulation-des-trains-dans-plusieurs-regions_6015979_3234.html

Un quart seulement des TER circulent dans toute la France, selon le gouvernement. A Paris, le trafic des RER et du Transilien est très ralenti.

Par Publié aujourd’hui à 08h40, mis à jour à 14h53

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Un mouvement social inopiné a éclaté, vendredi 18 octobre, sur de nombreuses lignes SNCF, créant des perturbations parfois fortes sur le réseau des trains régionaux (TER) et du Transilien en Ile-de-France. Selon nos informations, quelques conducteurs de trains à grande vitesse (TGV) ont aussi cessé le travail, en particulier dans la région lyonnaise, et dans une moindre mesure sur l’axe Atlantique.

« Le trafic est très perturbé en régions, 25 % des TER roulent environ », a précisé sur BFM-TV le secrétaire d’Etat aux transports, Jean-Baptiste Djebbari, prenant l’exemple de l’Occitanie, où « quasiment aucun » de ces trains ne circule. Dans le détail :

  • la circulation des trains régionaux est particulièrement affectée en région Grand-Est, en Bretagne (un train sur deux à la prise de service), en Occitanie et en Provence-Alpes-Côte d’Azur (tous les TER suspendus) ;
  • en région parisienne, le trafic est fortement ralenti pour les RER et le Transilien ;
  • Le trafic est très ralenti sur l’ensemble de la ligne du RER D jusqu’en fin de journée, avec de nombreux trains supprimés. Idem sur les lignes H, J, K, L et R. Pour cette dernière, aucun train ne circule ;
  • concernant le RER A, le trafic est perturbé entre la Défense et Poissy, et la Défense et Cergy-le-Haut. Pour le RER B, le trafic est très perturbé entre Gare-du-Nord et l’aéroport Charles-de-Gaulle ou Mitry-Claye.

L’événement se produit le premier jour des congés scolaires de Toussaint, alors que des milliers de voyageurs s’apprêtent à prendre des trains pour les vacances. La SNCF a prévu de fournir avant 13 heures un état du trafic TGV.

Une réunion d’urgence entre la direction des ressources humaines et la Confédération générale du travail (CGT) s’est tenue vendredi matin au siège de la SNCF, à Saint-Denis. Au sortir de rendez-vous, la direction de l’entreprise a publié un communiqué dans lequel elle s’indigne d’une grève « totalement irrégulière » qui « provoque une gêne insupportable pour des millions d’usagers à travers toute la France », appelant à « une reprise immédiate d’un service normal ».

Pour résoudre la crise, l’entreprise détaille également plusieurs « actions concrètes », dont la tenue d’une réunion de concertation nationale entre la direction et l’ensemble des organisations syndicales nationales, ainsi que des concertations dans chaque région. En ligne de mire notamment, les questions de sécurité et de sûreté posées par les conducteurs.

Un mouvement né en réaction à un accident

Ce mouvement social inopiné, déclenché sans préavis, est en effet la conséquence d’un accident impliquant un TER survenu il ya deux jours dans les Ardennes et à la suite duquel les cheminots ont demandé à exercer leur droit de retrait.

Mercredi 16 octobre, un TER transportant 70 personnes a percuté un convoi exceptionnel à un passage à niveau situé à Saint-Pierre-sur-Vence (Ardennes) endommageant très sérieusement l’avant du train et faisant sortir légèrement la rame de ses rails. Selon la CGT, le conducteur, qui était le seul agent à bord, a dû, contusionné et légèrement blessé à la jambe, sortir du train pour sécuriser la voie afin d’éviter une collision car la radio et le dispositif de liaison sol-train étaient hors service en raison de la violence du choc. Il a dans cet intervalle dû laisser les passagers seuls, deux d’entre eux étant légèrement blessés.

Le récit de cet accident a peu à peu enflammé les réseaux sociaux des cheminots. La CGT met en cause le mode d’exploitation « équipement agent seul » – c’est-à-dire un conducteur mais pas de contrôleur –, qui a été mis en place ces dernières années dans les TER (80 % des trains régionaux n’ont plus de contrôleurs) et qui existe depuis quarante ans dans les trains de banlieue et les RER de la région parisienne.

« Il y a un ras-le-bol qui monte dans les régions, a expliqué au Monde Laurent Brun, le secrétaire général de la CGT-Cheminots. Cet accident montre combien la politique de suppression des contrôleurs est inacceptable. Par chance, le choc a endommagé la caténaire et coupé le courant. Cela a stoppé le train qui arrivait en face. Sans cela, l’accident aurait pu être dramatique. »

« Il n’y a eu à aucun moment mise en danger des passagers, parce que le conducteur était seul à bord, rétorque un porte-parole de la SNCF. L’“équipement agent seul” est éprouvé en Ile-de-France, homologué et utilisé dans toute l’Europe. Ce mouvement paraît disporportionné et inadapté. »

Contexte social tendu à la SNCF

Ce mouvement social se produit dans un contexte social tendu à la SNCF. Des négociations difficiles sont en cours sur la future organisation de la SNCF qui se mettra en place à partir du 1er janvier, date de déclenchement de la réforme ferroviaire. Celle-ci prévoit la fin de l’embauche au statut et l’arrivée d’entreprises ferroviaires concurrentes.

A cela s’ajoute la mise en place de la réforme des retraites qui envisage de faire disparaitre le régime spécial des cheminots. Deux syndicats de la SNCF (UNSA-Ferroviaire et SUD-Rail) ont appelé à se joindre à la grève illimitée lancée sur ce thème par les représentants des salariés de la RATP, le 5 décembre prochain.

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